On en avait rêvé, on l’a fait : cinq jours pour penser, agir et transformer autour des grandes urgences écologique, démocratique, sociale et économique, en créant un espace vivant et ouvert de rencontres, débats, projections de films, animations, concerts…
Voici le Carnet de cette 1ère édition des Journées Imagine organisée à Liège du 24 au 28 avril 2019 qui a drainé plus de 3.000 personnes. Un moment collectif plein de vitalité, de connexions et de savoirs échangés.
Investir la Cité Ardente autour des grandes lignes éditoriales de notre magazine ? Construire en réseau un programme comprenant près de 40 événements dans 7 lieux avec l’Asbl Enjeu et six partenaires de choix (l’ULiège, Les Grignoux, le CNCD-11.11.11, le Théâtre de Liège, la Cité Miroir et le MADCafé) ? Décloisonner les institutions et les disciplines ? Le pari était ambitieux et osé, excitant et risqué. Mais, dès l’ouverture de notre éco-guinguette mercredi en fin d’après-midi, nous avons senti ce petit supplément d’âme secrètement rêvé pour cette 1ère édition : sous les lampions et au pied des food truks, il y avait du souffle, de l’enthousiasme et un esprit collectif naissant.
Derrière la voix envoutante de Virginie, la chanteuse de Dha Khan, et de leurs splendides envolées électro, triphop et soul, une liberté d’esprit a soudain envahi la place Xavier Neujean. Et, pendant cinq jours, les Journées Imagine vont prendre leur envol à l’image de notre magnifique NAbeille, le totem de l’événement, faite de fer et de plantes (voir ci-dessous), qui s’en ira butiner aux quatre coins de la ville, polliniser les cœurs et les esprits, emportant sous ses ailes une foultitude d’idées neuves, de mines réjouies, de débats féconds et d’opinions partagées.
La dynamique des esprits
On partira en quête d’infos et de sens débattre au cinéma Sauvenière autour du très beau film d’Anne-Sophie Novel Les médias, le monde et moi, avant de réoxygéner la démocratie au cœur d’un Liège100 inédit où un large panel de citoyens investis et créatifs vont réaliser à la Cité Miroir un exercice délibératif de grande tenue.
On butinera sur le marché Court-circuit, avant de s’envoler vers le festival Corps de textes sur les pas des migrations positives et des artistes en exil, pour finir sur un blind test politique, écologique et social endiablé.
On écoutera des entrepreneurs sociaux au service de la transition, un chef coq et ses savoureuses recettes anti-gaspi, des animateurs du MadMusée autour de l’art différencié.
On déambulera dans le Climaction et ses solutions, au sein des ateliers participatifs « plus chauds que le climat », entre les lignes d’une rencontre remarquable entre les jeunes de Youth for climate et le philosophe Dominique Bourg.
On s’en ira méditer un peu, petit-déjeuner avec Oxfam, marcher sur la colline, affronter la pluie à vélo, écouter les chants du monde de la Midnight Voodoo et ceux des trompettes du Royal Guidon Hesbignon.
Il y aura des temps très forts, des moments plus calmes, des rayons de soleil et des bourrasques, des débats de haut vol et des savoirs qui réchauffent les esprits.
Il y aura de la bière artisanale, des wraps végé, des militants de mass critique, le sourire immense de Lucienne au petit coin d’aisance, des Vélotafeurs et leur hoppy bike, et quelques DJ d’un soir en mode Mix toi-même.
Il y aura le récit bouleversant de Wejdan Nassif et son exil syrien, les dessous chics de l’économie circulaire, les membres de l’ULiège en mode remue-méninges, les derniers numéros d’Imagine qui passent de main en main.
Il y aura de la fraternité partagée, de l’audace et des idées.
Et puis notre joyeuse NAbeille, arrosée à souhait, nourrie de toutes ces rencontres, venue se poser avant de repartir vers des lendemains prometteurs à réinventer ensemble.
Hugues Dorzée, rédacteur en chef d’Imagine
Carnet des Journées Imagine réalisé par Mariel Engels, Claire Lengrand
et Vincent de Lannoy.
Inauguration de l’éco-guinguette
et son bar de la transition
Pendant cinq jours, notre éco-guinguette joliment aménagée (scène en palettes, sièges en bois de récup’, lampes artisanales...) constitue le cœur de l’événement.
C’est un lieu chaleureux et fédérateur où l’on vient en famille ou entre amis pour se ressourcer et alimenter à la fois son corps et son esprit.
Trois foodtrucks tenus par le MADcafé y proposent des produits locaux, à base de plats faits maison, de bières artisanales servis dans des gobelets réutilisables et de la vraie vaisselle. Concerts, animations en tous genres, atelier cuisine... L’éco-guinguette est le QG des Journées, synonyme de réflexion et d’échanges des bonnes pratiques : celui du marché des petits producteurs, puis du village Climaction.
Tarifs démocratiques, toilettes sèches, tri sélectif des déchets grâce aux îlots installés par Intradel, gobelets réutilisables, racks vélos, donnerie à portée de main... Tout a été pensé pour monter un événement éco-responsable et inclusif.
Malgré une météo froide et variable, les rires et la bonne humeur résonneront à l’intérieur de cet espace ouvert les cinq jours durant.
Concert du groupe liégeois Dha Khan
En guise de lancement des Journées Imagine, le trio liégeois Dha Khan a envoûté et séduit le public présent en nombre. Alors qu’une pluie torrentielle s’abat sur la Cité Ardente, l’atmosphère est chaleureuse et lumineuse sous la voix suave de Virginie, la basse de Dimitri et les machines/guitares de Lee. Ce jeune groupe cherche à transgresser les frontières et à entraîner son public dans un monde sans limites ni barrières. Mêlant électro et triphop, soul et rock, leurs textes abordent les problématiques de société actuelles ainsi que ceux de nos choix intérieurs. Leur premier EP sorti en 2018 intitulé Frontiers incarne la diversité et fait écho aux thématiques abordées lors des cinq jours du festival. Un magnifique moment partagé.
Soirée En quête d’infos et de sens
Autre lieu, nouvelle atmosphère : cap sur le cinéma Sauvenière, mercredi soir, en quête d’infos et de sens. Ludivine Faniel, animatrice aux Grignoux, a introduit l’excellent film Les médias, le monde et moi d’Anne-Sophie Novel, en compagnie de Hugues Dorzée, rédacteur en chef d’Imagine.
On y parle d’infobésité, de journalisme lent et d’impact, de crise des médias, d’innovations journalistiques menées de Philadelphie à Londres, de Copenhague à Paris, de youtubeurs engagés, de relations amour-haine entre presse et citoyens.
Ce road movie énergique et ciselé parvient à articuler une réflexion positive et critique avec de nombreux témoignages de professionnels brillants qui parlent de leurs métiers, de leurs limites et de leurs espoirs.
Après ce documentaire réjouissant, Marc Vanesse (professeur à l’ULiège) a animé un débat autour du thème « Du journalisme utile, constructif et inspirant, à quoi bon ?! » avec Anne-Sophie Novel, Hugues Dorzée, Jean-Jacques Jespers (ex-RTBF, ULB) et Yasmine Boudaka, coordinatrice de l’association des acteurs de l’info constructive New6S.
Le vote en plénière avant les ateliers délibératifs
Baptisé L100 (Liège100), ce panel citoyen a réuni à la Cité Miroir des citoyens venus de tous les horizons : rhétoriciens de Lycée Jean Boets et de l’Athénée de Chênée, retraités, chômeurs, étudiants du supérieur et stagiaires en insertion socioprofessionnelle.
En matinée et en séance plénière, quatre intervenants ont partagé leurs expériences : Michel Recloux, coordinateur de la bibliothèque Georges Orwell, a évoqué les limites de la démocratie représentative ; Yves Dejaeghere, de la Fondation pour les générations futures, a présenté deux initiatives innovantes (le Sommet citoyen G1000 organisé en 2011 et le modèle inédit de démocratie délibérative mené à Eupen), Gautier Slonina, du mouvement Agora a exposé ce projet politique nouveau axé sur le tirage au sort, et Fatima Zibouh, politologue, est revenue sur la passionnante aventure du Women100 menée récemment à Bruxelles.
En fin de matinée, l’assemblée a voté parmi dix propositions de thèmes en lien avec la Ville de Liège. Quatre d’entre eux ont été retenus : « Comment favoriser l’intégration positive des sans-abris et des mendiants dans l’espace public ? », « Comment rendre l’espace public plus beau et plus convivial ? », « Comment améliorer le vivre ensemble entre personnes de générations différentes et/ou nées ici ou venues d’ailleurs ? » et « Quel(s) projets(s) mettre en œuvre pour favoriser une mobilité durable dans et vers Liège et/ou réduire l’usage de la voiture ? ».
Durant tout l’après-midi, sept tables de délibération mixtes et organisées par tirage au sort ont débattu autour de ces quatre questions et d’un budget participatif fictif (15.000 euros). Chaque table portait le nom d’un quartier de Liège : La Boverie, L’esplanade Saint-Léonard, Le Perron, Les Coteaux de la citadelle, Le Botanique, La Chartreuse et La Passerelle.
Ils étaient accompagnés par des facilitateurs spécialisés autour d’une méthode éprouvée de créativité et de gouvernance (les chapeaux de bono) et pouvaient recourir à des personnes ressources (Joëlle Saive, porte-parole de la Ville, et des journalistes d’Imagine) pour alimenter leurs débats.
Durant 3 heures, les membres du L100 ont délibéré, débattu, échangé et créé ensemble avec sérieux et enthousiasme.
Au terme de la journée, un rapporteur par table est venu présenter son projet. Celui-ci a ensuite été remis officiellement au directeur de la Ville de Liège, Jean-Christophe Peterkenne, qui a souligné « la qualité du travail réalisé et l’implication des citoyens » et s’est engagé à déposer les contributions du L100/Journées Imagine sur la plateforme participative Liège 2025.
Les Liégeois auront ainsi l’occasion de voter pour les initiatives du L100 qui pourraient être ensuite intégrées dans le futur projet de Ville présenté au conseil communal en septembre prochain.
« Comment exercer sa citoyenneté à l’Université ? »
En parallèle au L100, les membres de l’ULiège se sont questionnés sur leur engagement en tant que citoyens et sur les liens entre l’institution et la Cité au cours d’un grand atelier d’intelligence collective intitulé « Comment exercer sa citoyenneté à l’Université ? »
« A travers cette matinée participative, il s’agissait d’inviter les membres de la communauté universitaire à se questionner, de façon individuelle et collective, sur leur engagement en tant que citoyen, explique Thomas Beyer, coordinateur de projets au sein de www.rejouisciences.uliege.be, une cellule de diffusion des sciences et des techniques de l’Université de Liège. Il s’agissait aussi de faire circuler des idées novatrices, de décloisonner les disciplines, de susciter le dialogue et d’interroger les grands enjeux contemporains qui figuraient au cœur des Journées Imagine (climat, migrations, mobilité, économie solidaire, transition écologique, urbanisme…). Parmi les personnes présentes, il y avait des membres de l’administration, des chercheurs, des professeurs. Ces ateliers d’intelligence collective ont permis l’émergence d’une dynamique propice au partage d’expériences et de points de vue. Ils nous ont également livré de nombreuses idées, des pistes d’action et des solutions concrètes que nous allons trier, compiler et diffuser le moment venu », conclut Thomas Beyer.
Marché des produits locaux Court-Circuit
Jeudi après-midi, on sortait aussi les paniers et les cabas… Au programme : du bon, du frais, du local et du bio avec notamment Sarah Remy, maraîchère au Jardin de la Fouarge, l’une des productrices présente sur le marché Court-circuit qui a lieu tous les 2ème et 4ème jeudis de chaque mois de 15h à 19h. On y trouve des fruits et légumes de saison, des produits laitiers, des pains et des pâtisseries, de la viande et de la charcuterie, le tout étant produit dans un rayon maximum de 50 kilomètres autour de Liège.
L’objectif ? Recréer un lien étroit entre producteurs et consommateurs.
Depuis quatre ans, vingt-cinq artisans occupent ainsi la place Xavier-Neujean pour partager leurs produits, leurs passions et leurs savoir-faire. Le prochain marché se tiendra le jeudi 9 mai.
Afterwork des Vélotafeurs
Avant d’attaquer en force le week-end, les Vélotafeurs ont proposé un afterwork d’un genre un peu particulier sous le chapiteau : un apéro-vélo à l’aspect vintage et un brin rock’n’roll.
Derrière cette communauté de cyclo-travailleurs qui prônent l’usage du vélo comme alternative à la voiture pour se rendre au travail, il y a l’association Bikes against the machine créée en septembre 2018 par Guillaume Kerckhofs et un groupe d’amis, en s’inspirant d’un mouvement existant en France.
Résidant à Tilff mais travaillant à Liège, il a choisi de troquer sa voiture contre un vélo électrique, avec lequel il n’hésite plus à se déplacer même pour de longues distances : « Je vais partout avec mon vélo et j’emmène parfois mes trois enfants avec moi. » .
Dans l’éco-guinguette, la jeune association qui compte aujourd’hui une cinquantaine de membres actifs issus de tous les horizons, a présenté quelques modèles au look rétro.
Tous les 3ème jeudi du mois, les Vélotafeurs organisent un afterwork, un moment festif qui permet des échanges d’expériences dans un esprit convivial. L’association propose aussi des test ride, afin de découvrir toutes les possibilités de ces vélos 100 % rock’roll avec assistance électrique. Le tout avec une jolie vélosophie : « Vivre à vélo, c’est vivre en profitant de chaque instant, c’est un ralentissement nécessaire dans une société qui va toujours plus vite. C’est prendre le temps de vivre. »
Soirée Migrations positives
« Comment la solidarité s’invente-t-elle ? » C’était le thème de la première partie de la grande soirée Migrations positives organisée avec le Théâtre de Liège, dans le cadre du festival Corps de texte.
Lors d’une table ronde organisée par le CNCD-11.11.11, quatre intervenants de qualité ont partagé avec un public attentif et impliqué une série d’initiatives menée avec et pour les migrants.
Thierry Müller est venu présenter le projet Migrations Libres , un collectif humanitaire et politique qui vise à offrir aux personnes de passage ou en situation précaire un lieu d’hébergement pour « les protéger de la faim, du froid, de la solitude, des arrestations violentes et arbitraires, de leur faciliter l’accès aux soins de santé ou à l’aide juridique ».
Véronique Fagan, travailleuse aux Femmes prévoyantes socialistes de Liège, a partagé le projet de Sécu solidaire monté avec la Voix des Sans papiers dans le cadre de l’occupation de Burenville.
Cossi Noudfinin a partagé l’initative « 100Pap », autour d’une bière « engagée et solidaire » vendue au profit d’actions menées en faveur des sans-papiers.
Et enfin, Rami Sarhil, originaire d’Alep en Syrie, arrivé à Liège en 2015, est venu avec sa belle initiative « Manger chez Rami », où le jeune cuisinier invite chez lui ou s’invite chez vous pour partager sa savoureuse cuisine syrienne.
Quatre projets, quatre histoires, et un autre regard sur les migrations qui fait du bien, aux antipodes des discours xénophobes, anxiogènes et stigmatisants.
Des mots en exil
Cette soirée autour des migrations se poursuivra intensément avec Wejdan Nassif, ancienne enseignante et désormais auteure, qui a fuit la révolution syrienne en 2012, et avec son livre Lettres de Syrie (éd.Buchet-Chastel). Dans la salle de l’œil vert, elle raconte son arrivée à Metz, les souffrances de l’exil, le regard des occidentaux… avec simplicité et émotion.
En arabe et en français, ses mots résonnent grâce à la traduction rigoureuse et posée d’Hassan Jarfi. Et on se laisse bercer par la lecture de ses textes en découvrant un beau projet porté par l’association Baïtona (« notre maison » en syrien) et le Festival Passages de Metz.
Dans la foulée, c’est l’écrivaine française d’origine iranienne Abnousse Shalmani (Les exilés meurent aussi d’amour et Sade, Khomeiny et moi) qui dialogue avec Rachel Brahy, de la Maison des sciences de l’homme. Une rencontre entre ici et là-bas, ponctuée par les sonorités puissantes de la clarinettiste Aurélie Charneux et les lectures soignées de Sarah Brahy.
Blind test écologique et social
Une soirée Blind test « écologique et social » se tenait en parallèle sous le chapiteau de l’éco-guinguette. Bobby B, à la fois DJ salé et poivré et chroniqueur à @48FM, était aux commandes des platines. Pendant près de deux heures trente, il a joué plusieurs séries de morceaux axées autour des thématiques des Journées Imagine ; la série « Arc-en-ciel » regroupait des chansons autour du soleil et de la pluie à l’instar de « Under the sunshine » de Bensley ; la série « Recyclage » était ponctuée par des reprises de titres comme le célébrissime « Rock the Casbah » des Clash par Rachid Taha ; ou encore la série « Chic planète » illustrée par le titre « Respire » de Mickey 3D. Parmi les sept équipes en lice, trois sont sorties vainqueurs : les équipes « Demain », « Vive les verres » et « Jeunesse Musicale ».
Investir dans l’économie sociale
pour financer la transition
Et si on investissait dans l’économie sociale pour financer la transition ? Dix coopératives l’ont fait, et leur expérience méritait d’être mise en avant. Les cinq partenaires de cette matinée « entreprendre pour le bien commun » (Saw-B, Sowecsom, Financité, Step entreprendre et Imagine) ont présenté chacun deux « coups de cœur » dans des domaines divers (finance éthique, transport vert, alimentation, énergies renouvelables, web…) : Revival, Ecolodge, le Comptoir des ressources créatives, Novacitis, Rayon 9, Histoire d’un grain, Ethicable, Oufticoop et Cytomine.
Après quoi, les participants ont travaillé par table, de manière participative, autour de quatre thèmes : l’impact de l’économie sociale, le financement, le passage du « je » au « nous » et les étapes clés pour construire un projet collectif, avant un échange avec les représentants des partis en lice aux élections : Jean-Claude Marcourt (PS), Véronica Cremasco (Ecolo), Benoît Dreze (CDH) et Diana Nikolic (MR). Le PTB et Défi n’ayant pas envoyé de représentants.
L’après-midi, c’était au tour d’Impact Now d’investir la Cité Miroir avec des ateliers, un hackathon, des rencontres entre entrepreneurs, étudiants, investisseurs positifs... Des débats nourris et alimentés par des expériences économiques variées
Mondialisation et national-populisme
Le vendredi après-midi, les Journées Imagine sont passées en mode géopolitique avec Arnaud Zacharie, secrétaire général du Centre national de coopération au développement et docteur en sciences politiques et sociales à l’Université libre de Bruxelles ainsi qu’à l’ULiège autour d’une remarquable conférence intitulée « Mondialisation et national-populisme » dans la salle Pousseur de l’Opéra.
Pendant près de deux heures, l’auteur d’un livre à venir sur ce sujet ô combien d’actualité a dressé un panorama complet sur l’histoire, les moteurs et les caractéristiques de la mondialisation, en liant ceux-ci à la montée du national-populisme et en comparant la situation actuelle avec celle des années 30.
Il a ensuite proposé des alternatives au système néolibéral, en démontrant combien ce modèle est un véritable échec économique, social et environnemental.
Masterclass de cuisine anti-gaspi
Alors que l’éco-guinguette reprend doucement vie en début d’après-midi, une cuisine de fortune se dresse sur la scène délaissée la veille par le DJ Bobby B (48 FM). Le vibrant blind test politique, écologique et social fait place à une masterclass de cuisine anti-gaspi : Damien Poncelet, chef cuisinier et coach en cuisine durable, multiplie les plats et les idées avec seulement quelques carottes, un chou-fleur et plusieurs oignons. Devant son public, il pèse les portions généralement déjetées des différents légumes. Il partage également son sens de la découpe. « Toujours couper le chou-fleur de la tige vers la fleur pour limiter les pertes », c’est noté ! Tous les participants goûtent les préparations au fur et à mesure que le chef Poncelet garnit les cuillères apéritives. Et au moment de ranger la vaisselle, les plus gourmand(e)s se préparent des doggy bags.
Think circular
Les afterworks de l’économie circulaire
Think Circular, c’est le nom de cette jeune organisation à but non lucratif qui « vulgarise et transmet les principes de l’économie circulaire par le biais de workshops, de formations et d’animations ».
A l’occasion des Journées Imagine, elle a lancé son premier afterwork de l’économie circulaire. Et ce fut salle comble pour écouter Geoffroy Van Humbeeck de SmartWorld, Jean-Marie Bols de Mathy By Bols et Julien Dumont, de BeCircular.
Une occasion d’explorer ce modèle économique, systémique, écologique et porteur d’avenir, avant de déguster quelques bières artisanales.
Soirée dansante participative :
Mix toi-même !
Pour clôturer la semaine en beauté, la communauté Mix toi-même ! a laissé carte blanche à neuf DJ en herbe venus s’essayer aux platines. Tour à tour, les participants se sont succédés dans le grand mixeur rouge installé sur scène. Vingt minutes de gloire durant lesquelles ils ont pu partager leur univers musical (rap, électro, world…) et faire danser le public présent en nombre dans l’éco-guinguette. Un sacré moment roboratif et festif.
Grande soirée Etat d’urgence climatique
À un jet de pierre de là, dans l’amphi Opéra de l’ULiège, c’est la grande soirée Urgence climatique. Autour de Dominique Bourg, philosophe, essayiste et professeur à Lausanne, on va vivre un moment d’une grande qualité grâce aux cinq jeunes pour le climat invités à dialoguer avec cet intellectuel de renom, proche de Nicolas Hulot et candidat aux européennes avec le mouvement Urgence écologie.
Léa François, 17 ans, du collège Saint- Barthélémy, Antoine Poncelet, 18 ans, de la même école, et Augustin Crespin, 18 ans, du collège Saint-Servais, tous trois engagés dans le collectif Youth for climate Liège, accompagnés de Hugo Simon, 22 ans, étudiant à l’ULB et bachelier en droit européen à l’Université de Maastricht, et Clément Bastin, 21 ans, également étudiant à Maastricht (études européennes & mondialisation) vont enchaîner les questions d’une grande maturité autour des enjeux climatiques, de l’effondrement, du rôle des politiques, des modes d’action présents et à venir, des climatosceptiques, du rôle des scientifiques dans la Cité…
Un moment intense qui se prolongera avec une lecture proposée par la comédienne Eva Zingaro autour de la préface du livre de Dominique Bourg Une nouvelle Terre, et un entretien approfondi entre le philosophe et Hugues Dorzée, rédacteur en chef d’Imagine.
Projection du film « coup de cœur »
Au même moment, au cinéma Sauvenière, une séance faisait salle comble pour la projection (en collaboration avec l’Asbl Les Grignoux) du documentaire L’illusion verte de Werner Boote. Le cinéaste autrichien (nous avons déjà pu voir son Plastic Planet il y a quelques années) s’intéresse cette fois au greenwashing, ce discours d’une grande partie des multinationales qui prétendent à présent être vertueuses, agir pour la planète, faire dans le « durable » et qui constellent leurs produits ou publicités de labels divers mais toujours verts. Plus largement, il va constater en quelques points du globe les effets des actions qui se cachent derrière ces discours et surtout comment finalement les entreprises nous vendent de la bonne conscience.
NAbeille, totem de l’événement
Les Journées Imagine ont reçu la visite d’une invitée de marque. « NAbeille » est restée fidèle au poste tout le long, trônant fièrement devant l’éco-guinguette les cinq jours durant. Son corps en fer accueille des plantes mellifères en tous genres : fraisiers, romarins, myosotis, géraniums, pissenlits, pâquerettes… Un refuge à insectes se niche même dans sa queue. De quoi faire le bonheur des abeilles tout comme celui de leurs consœurs et confrères.
Line Brasseur est l’une des personnes à l’origine de ce projet. Avec trois amies, elles ont créé en 2017 l’asbl @NA qui propose des actions originales visant à « promouvoir une société plus écologique, créative et solidaire », telles que des ateliers interactifs et des installations artistico-végétales, à l’instar de NAbeille. Convaincue de l’impact positif porté par une telle initiative, la jeune femme avait déjà participé à la végétalisation de l’imposant @Le Bateau Vivre, alors transformé en plateforme de rencontres et de partages.
A l’image de ce projet, NAbeille est le fruit d’un travail d’équipe. Dès que l’idée leur est apparue, elles se sont tournées naturellement vers la section ferronnerie de l’I.R.H.O.V (Institut Royal pour handicapés de l’ouïe et de la vue) pour la conception du corps de l’abeille. Une fois le travail accompli, il ne manquait plus qu’à rajouter les nombreuses plantes afin d’accueillir les « hôtes mellifères » (pollinisateurs).
Pour Line, NAbeille permet « d’apporter plus de visibilité à un phénomène comme la disparition d’une espèce menacée comme l’abeille, essentielle à notre survie ». Intriguées, les personnes viennent d’elles-mêmes pour poser des questions, favorisant ainsi les échanges.
Line et ses amies ne comptent d’ailleurs pas s’arrêter en si bon chemin. Un nouveau projet d’installation d’une structure végétale et originale dans un parc, porté par des citoyens et en collaboration avec l’asbl La Lumière Œuvre Royale pour Aveugles et Malvoyants ainsi que la Ville de Liège, est sur les rails !
Grande journée Climaction
« J’adopte la finance éthique », « J’opte pour l’énergie verte », « J’encourage la solidarité internationale », « Je soutiens les circuits courts »… Dans le village des solutions climatiques, les Liégeois sont invités à relever quinze défis. Les animations se succèdent (puzzle géant, quizz…) et le public peut échanger à propos du Val’heureux, de l’électricité citoyenne, du futur tram, des aménagements cyclistes, des porteurs de projet en économie sociale, des moyens de portage pour bébé, des actions anti-nucléaires… Il y a de l’info à portée de mains et des exposants passionnants et engagés.
Plus chaud que le climat
Si crier et marcher ne suffisent plus, comment faire entendre sa voix ? Comment se tenir au courant des différentes mobilisations qui voient encore le jour ? Comment désobéir, faire pression et faire réellement bouger les destructeurs de la planète qui ont les leviers à portée de main pour sauver l’humanité mais qui par intérêts politiques ou financiers ne les saisissent pas ? A quoi servirait une loi climat ? Comment articuler le combat social et écologique ?...
Ces quelques questions étaient au cœur de l’atelier participatif « Plus chauds que le climat » organisé par le CNCD-11.11.11 à la Cité Miroir. Des citoyens en questionnement ont ainsi échangé sans œillères avec des experts et des militants.
Soirée Sexe, race & colonies
Au Théâtre de Liège, le Festival Corps de textes et les Journées Imagine accueillent l’anthropologue français Gilles Boëtsch, qui a co-dirigé l’ouvrage collectif Sexe, race et colonies (La Découverte), écrit par 97 historiens.
Un travail scientifique d’une ampleur inégalée (540 pages, 1200 iconographies extraites d’un corpus de 70 000 pièces, six siècles parcourus…), qui nous plonge dans l’histoire des colonies, et aborde la domination, la ségrégation, l’exploitation du corps de la femme…
Un livre controversé, mais tellement nécessaire, qui débouchera sur une soirée instructive et animée entre hier et aujourd’hui.
Midnight Voodoo
La nuit se prolonge grâce à 48 FM et quatre DJ’s amoureux de voyage, de vinyles et de musiques du monde. Une Midnight Voodoo sur fond d’afrobeat, d’arabic grooves, de latino disco, de japanese soul et autres musiques des quatre coins du monde. Enivrant et électrisant. L’éco-guinguette en redemande.
Petit-déjeuner Oxfam
Le dernier jour des Journées Imagine était consacré à la mobilité douce. Malgré le temps froid et pluvieux, quelques dizaines de courageux ont tenté la randonnée exploratoire proposée par Urbagora sur les hauteurs de Liège et opté pour les sorties cyclos du Gracq et de Provélo.
Dans l’éco-guinguette, les bénévoles d’Oxfam ont dressé un superbe buffet et proposent un petit-déjeuner sain, nourrissant et équitable défendant un modèle de consommation alternatif.
Après l’agitation des jours précédents, l’ambiance est calme et sereine. Et, dans le village Climaction, chacun savoure les rares moments d’éclaircie en se faisant une raison.
Et la fanfare s’invite...
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Et soudain, comme par magie, en milieu d’après-midi, les grêlons font place à une lumière progressive. Les Journées Imagine touchent doucement à leur fin quand débarque, de l’autre bout de la ville, la joyeuse troupe du Royal Guidon Hesbignon, la fanfare historique de Haneffe, en service commandé pour Liège-Bastogne-Liège.
Trente musicien(ne)s à vélo, trempés, fatigués, mais ravis de faire une halte dans l’éco-guinguette. Un petit moment suspendu entre les cuivres, les chants et les rires, de Joe Dassin à Coldplay, en passant par quelques airs populaires, la fanfare hesbignonne clôture en beauté ces cinq jours intenses pour « penser, agir et transformer ».